Retour sur un passé douloureux : rapports de la Chambre régionale des Comptes
Ecrit le 18 novembre 1998
Une réunion de la Communauté de Communes de Derval a eu lieu jeudi 12 novembre 98. Les élus, qui commencent à être méfiants, ont posé de nombreuses questions au président Michel Hunault, contraignant celui-ci à leur lire une lettre du Sous-préfet qui concerne le budget primitif 1998.
Mais Michel HUNAULT ne leur a pas tout lu. En particulier, il n’a rien dit des quatre lettres qui lui ont été envoyées par la Chambre Régionale des Comptes et qu’il aurait dû leur lire, en vertu de l’article 87 de la loi du 2 mars 1982.
Ces lettres d’observations datent du 25 janvier 96, du 18 juin 96, du 25 octobre 96 et du 25 février 97. Elles nous ont été communiquées par Yves BLAIS, conseiller municipal de St Vincent des Landes.
La loi du 2 mars 1982 a instauré un contrôle a posteriori sur la régularité des actes budgétaires des collectivités locales ainsi que sur la régularité et la qualité des opérations de dépenses, de recettes, de patrimoine et de trésorerie. Cette tâche est dévolue aux Chambres Régionales des Comptes qui font régulièrement des observations aux maires, communautés de communes, etc. Voici le contenu des quatre lettres dont nous avons eu connaissance
Acte 1 : un déficit trop important
Le 23 octobre 1995, le préfet de la Région Pays de la Loire saisit la Chambre Régionale des Comptes. Motif : le compte administratif 1994 de la Communauté de Communes de Derval EST EN DEFICIT (1). La Chambre Régionale des Comptes interroge le président Michel HUNAULT puis rend son avis en sa séance du 25 janvier 1996 et dit :
– que la CC de Derval a un déficit
– que ce déficit est supérieur à 10 % des recettes d’exploitation
et qu’il est donc normal que le préfet s’en inquiète
Puis la Chambre Régionale des Comptes explique que ce déficit est dû à l’aménagement de la zone « Pôle agro-alimentaire » .
Plus précisément : « au décalage entre la réalisation des travaux et la mobilisation des financements ».
-11 MF de dépenses
– pour 7 MF de recettes
– Plus le droit d’investir jusqu’Ã l’an 2000
A la date du 25 janvier 1996, la Chambre chiffre en effet, à 11 062 233 F le montant des dépenses exigibles alors que les recettes attendues sont de 7 672 634 F dans l’immédiat.
On comprend pourquoi, dans un protocole signé avec le Crédit Local de France et le Crédit Mutuel de Loire-Atlantique Centre Ouest, il est prévu une « pause des investissements jusqu’Ã la clôture définitive des opérations en cours »
Quand cette clôture ? sans doute pas avant l’an 2000 puisque c’est cette année-là que les entreprises Cadiou et Salaisons du Castel finiront de payer leurs bâtiments industriels.
La Chambre Régionale des Comptes en vient alors à proposer à la CC de Derval de dégager « un produit fiscal suffisant pour financer (...) une annuité de la dette qui sera augmentée jusqu’en 2000 des frais financiers attachés aux avances nécessitées par le différé d’amortissement accordé aux deux industriels installés sur le pôle agro-alimentaire » .
Ceci veut dire que la Communauté de Communes a accepté que les deux entreprises Cadiou et Salaisons du Castel attendent l’an 2000 pour rembourser les emprunts et que, pour y faire face, la Chambre Régionale des Comptes demande à la CC de Derval d’augmenter les impôts locaux en conséquence. C’est d’ailleurs ce qui a été fait. Les contribuables comprennent pourquoi.
Enfin la Chambre Régionale des comptes demande au président d’informer « l’Assemblée délibérante dès sa plus proche réunion ». En fait, la CC de Derval n’en a toujours pas été informée.
Acte 2 : un emprunt en Suisse
Six mois plus tard, le 18 juin 1996, la Chambre Régionale des Comptes s’intéresse à nouveau à la CC de Derval pour voir si « les prévisions de recettes et dépenses ont été évaluées de façon sincère »
La Sodala réclame 478 000 F
On apprend alors que la CC de Derval (1) a fait acheter 18 ha environ, par la SODALA, au prix de 3 022 000 F (convention signée le 21 juin 94) - et que le 24 juin 94 la SODALA a revendu ces terrains à la CC de Derval (1) au prix de 3 022 000 F payables en 5 annuités de 604 600 F . Fort bien, direz-vous.
Sauf que la convention du 21 juin 94 précise que « les annuités seront majorées de tous les frais, dépenses et intérêts supportés effectivement par la SODALA ». La CC de Derval a déjà payé 604 596 F mais la SODALA réclame encore 498 000 F pour 1995 et 1996
Cela fait donc 498 000 F que la CC de Derval aurait dû inscrire en dépenses. Elle ne l’a pas fait. C’est du moins ce que dit la Chambre Régionale des Comptes.
Un emprunt suisse
La CC de Derval a souscrit, en juillet 1991 un emprunt de 636 000 F suisses soit 2 489 622 francs qui doit être remboursé le 1er août 96.
Mais la Cour des Comptes signale que la CC de Derval « n’a pas inscrit au budget primitif de 1996 les crédits nécessaires au remboursement » . elle indique donc qu’ « Il paraît nécessaire de prévoir au minimum une dépense de 2 650 000 F français »
Des entrepreneurs pas payés
La Chambre Régionale des Comptes ajoute que « la CC de Derval est encore redevable, soit à l’égard de la SELA, soit à l’égard des entrepreneurs, d’une dette totale de 7 500 000 F »
Et que « il y aurait lieu d’ajouter les intérêts moratoires dont la Communauté de Communes est redevable à l’égard des entreprises qui n’ont pas encore été payées des travaux qu’elles ont réalisés », soit 242 000 F, « sans tenir compte de la station de pré-traitement »
Des recettes incertaines
La Chambre Régionale des comptes relève que la CC de Derval espère une subvention du département de 300 000 F alors qu’elle doit être « ramenée à 200 000 F » puisque la CC de Derval n’a pas vendu assez de terrains
Elle note de même que le budget de la CC de Derval compte sur une subvention européenne (FEDER-5b) d’un montant de 2 086 000 F mais que, « aucune décision attributive ni convention n’a pu être produite pour justifier cette prévision de recettes » et que, dans sa lettre du 10 juin 1996, le préfet n’a pas fait état de cette subvention. « Il y a lieu en conséquence de supprimer la prévision de recette de 2 086 000 F inscrite à ce titre au budget primitif 1996 ».
La Chambre Régionale des comptes note enfin que la CC de Derval espère une recette de 962 870 F obtenue grâce à la vente de terrains, mais que celle-ci n’est pas suffisante et donc que la prévision de recettes paraît « surévaluée de 287 970 F »
Récapitulons :
dépenses à ajouter :
– 498 000 F (Sodala)*
– 2 650 000 F (emprunt suisse)
TOTAL : 3 048 000 F de dépenses en plus
Recettes à diminuer :
– 100 000 F (Conseil Général)
– 2 086 000 F (Europe)
– 287 970 F (vente de terrains)
TOTAL :2 473 970 F de recettes en moins
Compte tenu de quelques autres petites corrections, la Chambre Régionale des comptes estime que la CC de Derval devra, en 1996, emprunter 5 448 000 F de plus que prévu
Enfin la Chambre Régionale des Comptes demande au président d’informer « l’Assemblée délibérante dès sa plus proche réunion ». En fait, la CC de Derval n’en a pas été informée.
Acte 3 : l’entreprise Sabla se fâche
Cette fois-ci, c’est une entreprise qui réclame son dû : par voie d’avocat la société SABLA, sous-traitante dans le cadre d’un marché de construction de la station d’épuration, saisit la Chambre Régionale des Comptes le 11 septembre 1996.
Motif : elle réclame 1 099 184,80 F TTC dont elle ne parvient pas à obtenir le paiement depuis un an. De plus, elle réclame des intérêts moratoires que la Chambre des Comptes évalue à 221 300 F TTC .
Alors la Chambre Régionale des Comptes examine le budget de la CC de Derval, pour 1996 et considère qu’elle dispose de fonds « suffisants pour permettre le paiement des sommes dues notamment à la Société SABLA ».
Mis en demeure
Et elle « met en demeure » le président de la CC de Derval, c’est-Ã -dire Michel HUNAULT , « de faire procéder à une inscription complémentaire de crédits (...) pour permettre le paiement des intérêts moratoires dus à la société SABLA »
Enfin la Chambre Régionale des Comptes, le 25 octobre 1996, demande au président d’informer « l’Assemblée délibérante dès sa plus proche réunion ». En fait, la CC de Derval n’en a pas été informée.
Acte 4 : une autre entreprise réclame
Le 20 janvier 1997, c’est la société DLE (Devin Lemarchand Environnement) qui saisit la Chambre Régionale des Comptes, en raison des sommes restant dues dans le cadre d’un marché de construction de la station d’épuration (la même que précédemment). Elle réclame 450 454,66 F , impayés depuis décembre 94. Elle réclame en supplément des intérêts se montant à 119 611, 67 F TTC.
Michel Hunault encore mis en demeure de ...
La Chambre Régionale des Comptes , le 25 février 1997, constate cette fois que la CC de Derval n’a pas les fonds suffisants pour payer.
Elle MET EN DEMEURE le président de la CC de Derval, à savoir Michel HUNAULT, de « faire procéder à une inscription supplémentaire de crédits, au budget primitif 1997 » , c’est-Ã -dire, en clair, d’augmenter les impôts locaux.
Enfin la Chambre Régionale des comptes demande au président d’informer « l’Assemblée délibérante dès sa plus proche réunion ». En fait, la CC de Derval n’en a pas été informée. Cette fois-là non plus .
On en est là . Toutes ces observations proviennent des rapports définitifs de la Chambre Régionale des Comptes que tout un chacun peut obtenir sur simple demande.
Mais nous ne savons pas s’il y a des observations plus récentes (et pas encore communicables) de la Chambre Régionale des Comptes.
On peut se poser des questions
– Pourquoi avoir engagé des travaux que la CC de Derval est incapable de payer
– Pourquoi avoir tardé à payer les travaux effectués, au risque de générer des intérêts moratoires qui grèvent encore plus le budget
– Pourquoi ne pas avoir lu aux membres élus de la CC de Derval, les quatre rapports de la Chambre Régionale des Comptes ?
– Pourquoi l’emprunt « suisse » n’était-il pas inscrit au budget de la Communauté de Communes de Derval ? Y aurait-il des « oublis » analogues dans d’autres documents budgétaires ?
Tout ceci est très étonnant ! D’autant plus que le président Michel HUNAULT n’est pas un novice . N’était-il pas rapporteur général du budget au Conseil Général ?
D’autres entreprises non payées ?
Et qui dit qu’il n’y a pas d’autres entreprises non payées ? On se souvient que la société SIETAR, qui a réalisé le marché de la tuyauterie industrielle, a été mise en liquidation : 62 salariés à la porte (cf Presse-Océan du 25 mars 1995).
On a entendu dire par ailleurs que la société M filiale d’une grosse entreprise de travaux publics de la région n’a pas été payée non plus, mais ne réclame rien, pour l’instant. Le montant total serait de 1 400 000 F, intérêts moratoires compris. Les salariés s’inquiètent ....
En conclusion, nous ne commenterons pas la qualité de la gestion de Michel Hunault. Nos lecteurs sont bien assez avisés pour se faire une opinion tout seuls.
Note du 11 novembre 2004 : on découvrira d’autres choses pluus tard : lire page suivante