Portrait de Roussia, une des premières femmes DJ en France qui a débuté au début des années 90 et qui continuer à jouer avec autant de plaisir et d’engouement.
« Lors d’un voyage en Hollande, j’ai eu le choc de ma vie en voyant pour la première fois une femme mixer« . Dans le train qui la ramène vers la France, Roussia, 23 ans, jeune mannequin, décide de quitter les podiums pour devenir DJ. Quand, aujourd’hui, elle dit qu’elle n’aimerait pas jouer pour des défilés car l’espace créatif est trop restreint sous la férule d’un autre créateur, on comprend son envie de troquer le statut de mannequin/objet contre celui de DJ/sujet. Dix ans après, ce choix se lit un peu sur le visage de Roussia. Toujours belle, elle porte sur ce visage qui reste souriant, un peu de la fatigue des soirées passées à mixer. Si être une des premières femmes DJ n’a certainement pas toujours été facile, on ne sent pas la moindre trace d’amertume chez elle, tout au contraire. Elle semble très heureuse de faire ce métier qui continue de lui offrir rencontres et joies diverses.
Le lendemain de ce fameux jour en Hollande, elle va à la FNAC s’acheter des platines. Sa culture musicale ne date en effet pas de ce jour. Son père a dirigé pendant une dizaine d’années un petit journal de rock, ce qui lui a lui a permis d’avoir de nombreux disques entre les mains. Jeune elle écoute Cure, la new-wave puis elle passe à des choses beaucoup plus funk. « Je suis passé du total froid au total chaud« . Les changements brusques ne semblent visiblement pas l’effrayer, et, grâce aux contacts qu’elle a pu nouer dans le milieu de la mode notamment, elle commence à mixer à droite et à gauche. Etre une femme l’a beaucoup aidée, elle le reconnaît, car c’est un raffinement supplémentaire d’avoir une jolie fille aux platines, mais « cela ne suffit vraiment pas, il faut assurer« . Elle déplore d’ailleurs le fait qu’aucune femme ne soit reconnue en tant que DJ à part entière qu’il n’y ait pas l’équivalent d’un Carl Cox ou d’un Laurent Garnier. Très vite, on la fait travailler. Elle a une émission sur Radio FG, joue au Queen, au Rex, à l’Enfer, à l’Alcazar, à l’étranger et fait partie de l’équipe de BPM, le premier magasin importateur de vinyles house et techno en France. On apprécie rapidement son style sensuel et dynamique.
« J’aime la house gentille mais plus que tout, je préfère m adapter aux gens que j’ai en face de moi« . Si elle n’aime pas s’aventurer dans des trucs trop durs, elle n’hésite pas à jouer une house plus pêchue si les gens le réclament. La communication et la rencontre avec les gens est ce qui semble l’attacher le plus à son métier. « A chaque fois c’est une petite aventure, tu prends ton train sans trop savoir où tu vas, qui tu vas rencontrer avec qui tu vas mixer, c’est génial, ça m’enchante à chaque fois« . Autre aventure pour Roussia, les disques.
Elle a enregistré plusieurs titres, mais ce qu’elle a fait avec Sunshiners reste ce dont elle est la plus fière. « C’était bien, ça n’a pas trop vieilli, alors qu’on a fait ça en 1995. Et Chong (DJ qui faisait partie du groupe) était vraiment très bon« . Peu enclin à toucher aux machines, elle aimerait maintenant rencontrer quelqu’un qui lui apporte ce plus. « Ce qu’il faudrait maintenant pour aller plus haut c’est faire de la production, mais je suis pas Joe la bidouille, c’est plutôt le chant, il faut que je me bouge pour trouver des gens avec qui chanter« . Ses envies la portent aussi vers l’étranger.
Elle aimerait bien jouer à New York, en Belgique car elle adore les gens là bas pour leur gentillesse, en Angleterre et en Allemagne. « Je garde aussi beaucoup d’attaches avec la Hollande, car je suis à moitié Hollandaise, et ce sont des gens hyper sympas mais musicalement c’est pas encore ça, ils sont dans des trips transouilles hard« . Mais son plus cher rêve serait d’avoir un club à elle. « J’aimerais avoir un truc à moi, ne serait ce qu’un barœil s’appellerait Chez Roussia boîte funk comme il y avait Chez Roger boîte funk (l’ancien Globo), j’avais vu Trouble Funk là bas en concert, c’était chaud« .