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Mon proche refuse les soins psychiatriques. Que faire ?

Illustration: Tony H.

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Avant d'envisager des soins contre son gréDans quelle situation envisager des soins sans l'accord de la personne concernée ?Bienvenue dans le jargonEn quoi consiste une demande de soins sans consentementComment choisir la structure où adresser ma demandeL'ensemble de la procédure, résumée pas à pasPour aller plus loin

Mise à jour du 27 novembre 2019 : Ajout d'un lien et mise à jour d'un autre lien dans la partie Aller plus loin

Fin de la mise à jour

 

Sur les réseaux sociaux, l'incendie récent survenu dans le 16e arrondissement de Paris a relancé le débat sur les soins psychiatriques, et notamment ceux sans consentement. J'en profite pour rappeler que les personnes avec troubles mentaux sont rarement violentes, en tout cas envers les autres, et que par contre elles sont beaucoup plus susceptibles que le reste de la population de subir ou d'avoir subi des violences et des abus. Et quand on sait qu'1 personne sur 4 dans le monde fera face à un problème de santé mentale dans sa vie, ça fait beaucoup de gens : si on était tou·tes des meurtrier·es en puissance, une contrariété et demain soir pfffuit, plus d'êtres humains sur Terre !

 

Je sais aussi qu'il est fréquent que les familles de personnes en difficulté psychologique se demandent quoi faire si jamais leur proche avait un jour besoin de soins, mais était incapable de le reconnaître ou refusait toute aide en bloc. Que fait-on quand son enfant adulte, victime d'une addiction ou de graves pensées suicidaires par exemple, refuse d'être soigné·e, interrompt brusquement son traitement ou son suivi thérapeutique, ou reste persuadé·e qu'il ou elle doit absolument mourir ? Et quand il s'agit d'un·e membre de sa famille éloignée ? Ou d'un·e ami·e ?

 

Cet article ne vous donnera pas la solution d'un coup de baguette magique, mais vous y trouverez des ressources et des stratégies qui pourront vous être utiles à vous et à vos proches en souffrance.

Ceci est valable pour une situation en France. D'autres articles suivront sur le même sujet dans d'autres pays, c'est promis !

 

Cet article pourra vous paraître long : il est surtout plus détaillé et formulé plus simplement que sur beaucoup de sites. J'ai effectué de longues recherches et enduré une navigation sur des sites vraiment moches... ce sera toujours ça de gagné pour vous ! Vous trouverez donc des ressources précises pour compléter certains points, plutôt que d'écumer Internet seul·e et vous faire des noeuds au cerveau en essayant de vous y retrouver dans les termes techniques.

Si vous avez d'abord besoin d'un aperçu, la brochure du Psycom sur les soins sans consentement est un excellent récapitulatif.

Vous trouverez aussi à la fin de cet article La procédure résumée pas à pas. C'est parti !

 

Avant d'envisager des soins contre son gré

Le Psycom, organisme public dédié à l'information sur la santé mentale, possède deux rubriques très bien faites sur  les types de soins qui existent en France, l'une concernant les médicaments et l'autre les thérapies : détaillées, compréhensibles même quand on n'a pas fait médecine bac + 12, mais pas longues pour autant... C'est le miracle d'un organisme qui a réellement pour but d'informer la population ! Je vous les conseille pour mieux comprendre déjà ce que ça veut dire, des soins psychiatriques, et quelles formes ils peuvent prendre. Ça, c'est quelque chose qui vous aidera en amont à négocier avec votre proche, avant de devoir peut-être le ou la forcer à des soins contre son gré.

Et c'est vraiment ce qu'il faut privilégier, parce que les études démontrent que subir des soins (tout particulièrement psychiatriques), ce n'est pas ce qui marche le mieux : plus le ou la patient·e adhère au traitement et est prêt·e à le suivre activement, plus le traitement en question a de chances de fonctionner. C'est un peu le même principe, au fond, que le placebo... Pour les soins sans consentement, spécifiquement, le Psycom a pensé à vous, les proches, et vous a fait une brochure très claire (c'est celle que je vous conseillais plus haut pour avoir un aperçu).

 

Vous vous rendrez vite compte que les informations pratiques et ressources disponibles mentionnées sur le Psycom sont souvent centrées sur la région d'Île-de-France. Le moteur de recherche qui permet de trouver un établissement de soins, par exemple, couvre les départements de Paris, Seine-et-Marne, Seine-Saint-Denis et Hauts-de-Seine. Mais le site donne les contacts de toutes les associations d’usagers et de thérapeutes présents à l’échelle nationale, des lignes d’écoute et d’autres interlocuteurs, à qui vous pourrez demander des contacts dans votre région.

C'est une frustration que vous retrouverez d'ailleurs beaucoup sur l'Internet francophone, tout comme la majorité de l'Internet anglophone est concentrée sur les États-Unis. Ne vous découragez pas : parlez à vos médecins généralistes et autres, à vos pharmacien·nes, adressez-vous aux branches locales des associations nationales référencées sur le Psycom... De l'aide existe, même si elle peut être difficile à trouver. Et beaucoup d'associations existent ou se créent en province !

 

Dans quelle situation envisager des soins sans l'accord de la personne concernée ?

Pour simplifier, la loi prévoit que par défaut, toute personne concernée par des soins psychiatriques doit donner son accord. Les soins sans consentement sont et doivent donc rester une exception. Ce principe a été ré-affirmé en 2011 dans le cadre de quelques modifications, notamment la création de soins ambulatoires sans consentement (jusque-là les soins sans consentement prenaient uniquement la forme d'une hospitalisation totale).

 

Concrètement, ce que vous avez besoin de retenir tient en 3 conditions :

  • Votre proche doit souffrir de troubles mentaux avérés, c'est-à-dire avoir une maladie mentale reconnue et diagnostiquée par un·e médecin

 

  • La personne que vous cherchez à faire soigner doit avoir besoin de soins immédiatement : on dit bien là maintenant tout de suite, et pas juste idéalement ce week-end, ou dans une semaine précisément parce qu'on sait que c'est le moment où la personne sera en rupture de stock de cannabis et donc en crise. Il faut qu'il y ait besoin d'une surveillance médicale régulière voire constante (autrement dit, que vous-même ou d'autres proches ne fassiez pas l'affaire pour surveiller que la personne prend bien son traitement ou ne fait pas de tentative de suicide par exemple). Ces soins peuvent prendre des formes différentes (je vous renvoie à la page 5 de la brochure du Psycom sur les modalités de soins psychiatriques) :
    • Hospitalisation complète ou partielle (seulement la journée par exemple)
    • Ou bien soins dits ambulatoires (c'est-à-dire tout ce qui n'est pas une hospitalisation, comme se rendre au CMP pour prendre son traitement), après un temps obligatoire d'hospitalisation complète (pour mettre en place ladite surveillance médicale constante)

 

  • ET (dans le sens où il faut que ces trois conditions soient réunies simultanément, comme en maths) la personne doit absolument ne pas être en mesure de consentir aux soins dont elle a besoin. C'est-à-dire que c'est plus compliqué que juste ne pas être d'accord : la personne doit ne pas se rendre compte que sans ces soins, sa santé est en danger. Ou alors, elle doit s'en rendre compte... mais son trouble mental doit constituer la raison majeure qui l'empêche d'accepter ces soins, alors qu'il est médicalement établi qu'ils amélioreraient son état. Enfin, si la personne est inconsciente, là on rentre dans du soin strictement physique (somatique comme disent les gens qui s'y connaissent), c'est direction les urgences et on verra après pour les soins psychiatriques, cf. l'article que vous êtes en train de lire.

 

Concrètement, vous pouvez faire hospitaliser contre son gré une personne gravement suicidaire, dans le cas où elle est persuadée que des soins psychiatriques ne lui permettront jamais d'aller mieux et a l'intention d'en finir tout de suite pour ne pas rester plus longtemps un fardeau pour le monde.

Mais vous ne pourrez pas faire soigner sans son accord une personne avec une addiction au cannabis qui fume jusqu'à s'effondrer sur le bord de la route, mais n'a pas commis de violence envers elle-même ni envers les autres en conséquence directe de son addiction. Aussi terrible que cette situation soit, la personne reste maîtresse de sa vie et n'a pas à se soigner simplement parce que d'autres pensent qu'elle serait plus heureuse ainsi ou que la société s'en porterait mieux. C'est son choix en tant qu'adulte en pleine possession de ses facultés mentales et intellectuelles (même si souvent, on se doute que celles-ci sont altérées... toute la question est évidemment de pouvoir le prouver). La seule chose qui pourrait obliger légalement cette personne à suivre des soins psychiatriques serait qu'elle blesse quelqu'un d'autre ou se blesse elle-même. Et ce n'est pas le but, on est bien d'accord, même si parfois on se prend à espérer que ce soit le cas pour pouvoir enfin protéger la personne.

 

Ce n'est pas pour rien que la liberté fait partie de la devise de la France. Il faut absolument protéger le droit à la liberté pour tout le monde, et éviter des internements abusifs : sinon il serait trop facile de faire hospitaliser une personne âgée devenue dérangeante pour sa famille, ou une ancienne petite amie qui voudrait porter plainte pour violence conjugale, par exemple...

 

Rien n'est facile dans le domaine de la maladie mentale, et toute situation est forcément plus complexe que "cette personne est un danger pour la société, il faut la faire enfermer" ou "mon enfant adulte prend systématiquement de mauvaises décisions, il faut l'empêcher de ruiner sa vie". Mais des solutions existent. Armez-vous de courage et de patience, et ne restez pas seul·e face à cette situation de souffrance :

  • Rapprochez-vous d'une association de familles de patient·es, comme l'Unafam dans votre département par exemple

 

  • Rejoignez un groupe (de préférence fermé) sur Facebook dédié à la maladie de votre proche (si vous la connaissez), où vous pourrez échanger avec des personnes concernées ou des proches

 

  • Adhérez à une association dédiée au trouble mental dont souffre votre proche (si vous le connaissez)

 

  • Et au moins, parlez-en autour de vous à de la famille et/ou des ami·es en qui vous avez confiance. On est plus fort·e à plusieurs.

 

Bienvenue dans le jargon

Pour aborder les soins sans consentement, il vaut mieux d'abord connaître quelques termes précis.

  • SOINS SANS CONSENTEMENT (SSC pour le sigle mystérieux) : c'est de ça qu'on parle depuis le début, faire soigner votre proche contre son gré, après avoir essayé tout ce que vous pouviez pour lui faire accepter de suivre des soins. Ils se divisent en :
    • SPDT ou SDT (anciennement HO = Hospitalisation d'Office) : Soins Psychiatriques sur Demande d'un·e Tiers. Ça, c'est vous.
    • SPDTU ou SDTU : Soins Psychiatriques sur Demande d'un·e Tiers en Urgence. Ça, c'est vous aussi.
    • SPI : Soins psychiatriques en cas de Péril Imminent. Ça, c'est le ou la directeur-trice d'un établissement de santé.
    • SDRE : Soins psychiatriques sur Décision du ou de la Représentant·e de l'État. Ça, c'est le ou la Préfet·e, éventuellement un·e Mair·e, ou encore la Préfecture de Police à Paris.

 

  • Votre proche en difficulté psychique, c'est le ou la PATIENT·E (même si cette personne n'est pas encore concrètement soignée, vous formulez le souhait qu'elle le devienne).

 

  • Vous, vous êtes le ou la TIERS : membre de la famille proche ou éloignée, ami·e ou même collègue. L'important, c'est que vous puissiez attester d'une relation de proximité (ou d'un lien de famille) avec la personne, qui date d'AVANT la demande de soins pour elle. Concrètement :
    • Si vous êtes un cousin au 3e degré et que vous n'avez pas vu la personne pendant 2 ans avant de vous pointer à l'hôpital psy, ça va être compliqué parce que carrément illégitime.
    • À l'inverse, si vous êtes ami·e avec la personne depuis seulement 6 mois mais qu'elle est loin de sa famille, et que c'est vous qui l'avez accompagnée aux urgences psy la semaine dernière pour cause de pensées suicidaires, vous êtes probablement ce qui se rapproche le plus d'un·e tiers réellement inquiet·e pour elle.
    • Ensuite ce sera au directeur ou à la directrice de l'établissement d'accueil (voir plus bas) de décider si votre demande est acceptée ou pas.

 

  • Le ou la MÉDECIN : c'est celui ou celle qui va rédiger le certificat médical que vous devez joindre à votre demande de soins sans consentement (voir plus bas Comment faire une demande de soins sans consentement), sachant qu'il vous faudra 2 certificats médicaux.
    • Ce n'est pas forcément un·e psychiatre ! Mais, au moins pour l'un des 2 certificats médicaux à fournir, c'est idéal s'il s'agit du ou de la psychiatre qui suit votre proche. La loi exige en effet qu'au moins l'un des 2 certificats soit fourni par un·e médecin n'appartenant pas à l'établissement de soins qui accueillera votre proche.
    • En l'absence d'un·e psychiatre, ou si vous ne lui faites pas confiance par exemple, le ou la médecin traitant de la personne en souffrance psychique sera très bien placé·e pour rédiger l'un des 2 certificats, puisqu'a priori il ou elle connaît bien votre proche, et pas seulement dans un cadre psychiatrique.
    • Par contre, à cause de la notion de médecin et d'incapacité mentale à consentir aux soins, un·e psychologue ou psychothérapeute (qui n'est pas médecin) ne pourra pas rédiger ce certificat, même s'il ou elle suit votre proche depuis plusieurs années et connaît bien la complexité de la situation.
    • Concernant le 2e certificat médical, en général il est établi par un·e médecin de la structure de soins qui accueillera votre proche.

 

  • Le ou la DIRECTEUR·TRICE D'ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ : c'est la personne qui va concrètement accepter ou refuser votre demande de soins sans consentement.
    • C'est le ou la directeur·trice de la structure (hôpital ou autre, selon qu'il s'agit d'une hospitalisation complète ou de soins ambulatoires) où votre proche va être obligé·e de suivre les soins.
    • Il ou elle a d'ailleurs aussi la possibilité de demander des soins sans consentement pour un·e patient·e, c'est-à-dire sans qu'un·e tiers en fasse la demande. Cela peut se faire en cas de péril imminent, c'est-à-dire quand une personne a besoin de soins contre son gré, mais qu'aucun·e tiers ne peut ou ne veut en faire la demande. On appelle ça des SPI = soins psychiatriques en cas de péril imminent sans tiers (en France on aime bien les sigles, on en met partout !). Dans ce cas, 1 seul certificat médical suffit mais il doit spécifiquement être rédigé par un·e médecin n'appartenant pas à l'établissement d'accueil.
    • Sachez, tant qu'on y est, que vous pouvez être sollicité·e en tant que tiers (par ce·tte Directeur-trice le plus souvent) pour lancer une procédure de soins sans consentement pour votre proche. Cela arrive lorsqu'il ou elle estime que votre proche a besoin de soins... et se doit donc de vérifier avant tout si un·e tiers est d'accord pour faire cette demande. Pourquoi ? Parce que c'est toujours mieux de pouvoir faire démarrer la demande au niveau d'un·e tiers qui connaît relativement bien le ou la patient·e, qu'en passant directement au niveau des autorités. On ne fait pas n'importe quoi en matière de soins sans consentement, et heureusement.

 

  • Le ou la JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION (JLD pour les intimes) : c'est la personne qui va vérifier que tout est légal, aussi bien au niveau de la demande de soins sans consentement que son exécution (c'est-à-dire comment ça se passe dans la structure où votre proche reçoit les soins). Il ou elle va aussi vérifier que les droits du ou de la patient·e ainsi que ses intérêts sont respectés.
    • En tant que tiers, vous pouvez vous adresser au JLD à tout moment si vous estimez que quelque chose ne va pas : par exemple, si vous pensez que votre proche peut sortir car il ou elle n'a plus besoin d'une hospitalisation complète mais que les médecins s'y opposent. Ou l'inverse, si vous estimez qu'il est trop tôt pour faire sortir votre proche mais que les médecins ne sont pas de votre avis. Ou encore, si vous estimez que votre proche peut désormais consentir à ses soins (ça, c'est la bonne nouvelle que tout le monde espère et doit essayer d'obtenir).

 

  • Le ou la REPRÉSENTANT·E DE L'ÉTAT : c'est spécifiquement le ou la Préfet·e du territoire (soit un département soit une région) où réside votre proche. Dans des cas très précis, ça peut ne pas être un·e Préfet·e mais un·e Maire.
    • Il ou elle a en tout cas le pouvoir de décider qu'une personne sera soignée sans son consentement (pas comme vous, qui pouvez seulement en formuler la demande). Évidemment, le ou la Préfet·e doit également fournir le certificat médical d'un·e médecin pour appuyer sa décision, mais dans ce cas il n'en faut qu'1 seul (pour rappel, vous, vous devez produire 2 certificats médicaux) au moment où la décision est prise. Dans les 24h, un 2e certificat médical devra quand même être fourni.
    • Ce genre de décision est prise lorsqu'aucun·e tiers ne fait de demande, mais que que le ou la patient·e constitue un danger envers d'autres personnes ou un trouble grave à l'ordre public. Ce qui, je vous l'accorde, est une formulation potentiellement très floue, mais sachez qu'en fait il est assez rare qu'une telle décision soit prise.

 

En quoi consiste une demande de soins sans consentement

Maintenant que vous êtes un·e pro du jargon des soins sans consentement (pas le plus glorieux de vos succès, je vous l'accorde, m'enfin on fait ce qu'on peut), voici en quoi consiste une demande de soins sans consentement.

 

  1. D'abord vous allez devoir choisir entre deux types de demande d'admission : en urgence ou pas :
    • Soins psychiatriques à la demande d'un tiers (SPDT ou SDT de son p'tit nom) : le cas le plus classique de la demande de soins contre son gré pour un·e proche.
    • Soins psychiatriques à la demande d'un tiers en urgence (SPDTU ou SDTU, le p'tit frère pour les cas de danger imminent grave) :
      • La première différence avec l'admission sans urgence, c'est que l'urgence définie par la loi comme "l'existence d'un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade" est vraiment vitale. Ça peut être compliqué à définir, c'est sûr, mais le ou la médecin à qui vous demanderez de rédiger le 1er certificat pourra vous aider.
      • La deuxième différence avec l'admission sans urgence, c'est que pour formuler cette demande-là, 1 seul certificat médical est nécessaire. Dans ce cas il doit être fourni spécifiquement par un·e médecin de la structure d'accueil. Il doit aussi être suivi dans les 24h par un 2e certificat médical attestant de la nécessité des soins sans consentement, rédigé cette fois spécifiquement par un·e psychiatre qui ne soit pas le ou la premier·e médecin (mais qui a priori peut être issu·e de l'établissement d'accueil).
    • Voici un petit tableau très bien fait qui vous aidera à mieux visualiser les différents types de demande de soins sans consentement.

 

2. Ensuite, il va vous falloir rédiger une lettre manuscrite de demande de soins sans consentement. Dans ce document page 2, vous trouverez un modèle pour faire votre demande (en urgence ou pas).

 

3. Vous devrez demander à 2 médecins distinct·es de fournir un certificat médical comme quoi votre proche a besoin de soins contre son gré. Vous trouverez dans le même document page 2 un modèle de ce certificat médical.

 

4. Vous allez devoir choisir un établissement d'accueil qui dispensera les soins à votre proche (voir chapitre suivant Comment choisir la structure où adresser ma demande de soins sans consentement).

 

5. Les détails à connaître :

Un·e tiers ne pourra pas formuler une telle demande, s'il ou elle fait partie du personnel soignant de la structure qui dispensera les soins. Inutile donc de demander à l'infirmier·e psychiatrique avec qui votre proche s'entendait bien lors de sa dernière hospitalisation volontaire, de le faire parce que vous pensez qu' "un·e infirmier sera pris·e plus au sérieux que moi en faisant cette demande":

D'abord ce n'est pas vrai que ce·tte soignant·e sera pris·e plus au sérieux, car la famille est souvent (parfois au détriment d'ami·es qui sont pourtant beaucoup plus proches du ou de la patient·e) l'interlocutrice privilégiée.

Ensuite de façon générale, je vous conseille vraiment de vous assurer que le ou la tiers qui formule la demande soit quelqu'un qui connaisse bien le ou la patient·e en-dehors du système de soins psychiatriques : cela permet de respecter, autant que possible, les volontés de la personne en se basant sur ses choix de vie. Votre connaissance de son environnement et des difficultés auxquelles elle peut être soumise en-dehors de la structure d'accueil, permettra aussi de privilégier des types de soins qui lui conviendront au mieux.

 

Vous pouvez tout à fait formuler ce type de demande en tant que tiers si vous êtes tuteur·trice ou curateur·trice d'une personne majeure protégée. Mais il faut que vous l'ayez été déjà un bon moment avant de faire cette demande, sinon c'est toujours pareil, c'est suspect et on pourra estimer que vous ne connaissez pas suffisamment bien la personne ou que vous n'agissez pas dans son meilleur intérêt.

Concrètement, ça veut dire que vous ne pouvez pas décider de mettre votre proche sous votre tutelle (déjà parce que c'est une procédure qui prend du TEMPS et des PREUVES), en vue de lui imposer des soins sans consentement parce que "ça vous donnera une légitimité supplémentaire pour faire la demande".

Par contre si vous estimez que votre proche doit être mis·e sous tutelle par ailleurs, rien ne vous empêche de commencer cette démarche.

 

Les 2 certificats médicaux que vous fournirez doivent dater de moins de 15 jours. Votre demande, elle, ne doit pas spécialement dater de moins de quoique ce soit. Mais honnêtement ce sera plus simple (et plus logique) de rédiger la demande à partir du moment où vous aurez les certificats médicaux, pour pouvoir demander à ce que les soins commencent immédiatement. Alors oui, les soins doivent être nécessaires immédiatement MAIS les certificats médicaux peuvent dater de 2 semaines, y aurait-y pas comme une contradiction quelque part. C'est tout simplement parce que :

  • On ne peut pas demander à des médecins de faire ce genre de certificat médical tous les quatre matins.
  • Vous ne le savez peut-être que trop bien, il est parfois difficile de garder plusieurs jours d'affilée votre proche en souffrance au même endroit (notamment pour les personnes victimes d'addiction). Il peut donc s'écouler plusieurs jours entre le moment où le certificat médical est établi et le moment où votre proche est emmené·e pour se faire soigner.

 

Il faut qu'au moins l'un·e des deux médecins fournissant les certificats médicaux ne soit pas issu·e de la structure qui dispensera les soins à votre proche. Et pour rappel, ces médecins n'ont pas besoin d'être psychiatres.

Par contre il faut impérativement, et ça peut paraître évident mais on ne sait jamais, que ces deux médecins ne soient aucunement lié·es (par un lien de parenté, par des intérêts communs, ou de quelque façon que ce soit) ni l'un·e avec l'autre, ni avec votre proche, ni avec le ou la directeur·trice de l'établissement de soins, ni avec vous. Histoire de rester dans l'objectivité et la neutralité, déjà qu'en termes de liberté c'est bien compliqué tout ça.

 

La durée initiale des soins sans consentement est de 72h ( = 3 jours, pour les non-matheux·ses comme moi). Concrètement lorsque la décision est prise de forcer votre proche à être soigné·e, ça se passe sous forme d'hospitalisation complète mais ça ne peut durer que 3 jours max. À partir de là, c'est le ou la psychiatre de l'établissement qui décide s'il faut continuer les soins (hospitalisation ou soins ambulatoires) contre le gré de votre proche ou si on peut passer en soins normaux, c'est-à-dire avec son consentement.

À la seconde où votre proche est admis·e à l'établissement de santé, des contrôles pour vérifier qu'il ou elle a toujours besoins de soins contre son gré sont faits régulièrement. Vous en trouverez un excellent récapitulatif fait par le Psycom, avec également des infos sur les recours possibles.

 

Comment choisir la structure où adresser ma demande

Oui, il y a beaucoup de structures différentes, qui dispensent des soins psychiatriques également différents. C'est tout à fait normal si vous ne vous y retrouvez pas (mais ce n'est pas non plus une fatalité).

Pour mieux comprendre les structures de soins psychiatriques en France, je vous suggère d'aller faire un tour sur le site du Psycom (oui, encore lui mais que voulez-vous, l'équipe est bonne dans son domaine, c'est plutôt rassurant) en trois endroits précis :

1. Demandez d'abord aux médecins qui suivent votre proche s'ils ou elles peuvent vous conseiller un établissement. Psychiatre traitant idéalement, sinon généraliste traitant. Si vous ne les connaissez pas, demandez à votre médecin traitant à vous.

 

2. Vous pouvez aussi contacter directement le CMP de votre secteur (voir définition). Ça dépend tout bêtement de votre adresse de résidence, privilégiez celle de votre proche si vous n'habitez pas au même endroit. Rassurez-vous, vous saurez très vite en leur passant un coup de fil si c'est bien celui de votre secteur ou pas. Vous avez parfaitement le droit de les contacter pour ce genre de question, même si votre proche n'y a jamais été suivi·e.

  • Si vous ne connaissez pas le CMP de votre secteur, cherchez via cet annuaire national.
  • MAIS si vous habitez dans un trou perdu ou même dans une petite ville, il est très possible qu'il n'y ait pas de CMP près de chez vous mais que tout se passe dans un seul hôpital (par exemple, je n'ai pas trouvé grand-chose près de chez ma grand-mère au fin fond du Vaucluse).

 

3. Sinon, adressez-vous aux urgences des hôpitaux psychiatriques de votre département ou région pour leur demander conseil en expliquant brièvement votre situation. Si vous ne trouvez pas ou qu'il n'y a pas d'hôpital psychiatrique dans le coin, n'hésitez pas à vous adresser aux urgences de l'hôpital (général, du coup) le plus proche. De façon générale, en France tout est encore assez centralisé (ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose dans ce cas précis). Courage ! La santé mentale prend de plus en plus d'importance au niveau des priorités des gouvernements successifs : ça va dans le bon sens, c'est promis !

 

4. Vous pouvez aussi consulter cet annuaire qui couvre l'entièreté du territoire en France métropolitaine en termes de structures de soins psychiatriques (je ne garantis ni son exhaustivité ni sa mise à jour régulière, d'où le point 1 adressez-vous à votre bon vieux doc' de famille). Attention, au moment où j'écris cet article, les rares établissements privés qui peuvent accueillir des patient·es hospitalisé·es sous contrainte ne figurent pas dans cet annuaire.

 

5. Il reste évidemment le privé, plus cher mais souvent plus disponible (par contre là non plus la qualité n'est pas garantie, restez prudent·e). Encore une fois, adressez-vous d'abord à votre médecin traitant avant de balayer l'entièreté d'Internet. Et dans ce dernier cas, pensez à consulter d'abord l'annuaire en ligne de Doctolib, ça vous permettra d'avoir tout un tas de praticien·nes sous la main plutôt que de désespérer en tapant juste "établissement psychiatrique Drôme".

 

L'ensemble de la procédure, résumée pas à pas

1. Votre proche va mal, ne reconnaît pas son besoin de soins, vous tentez en vain de le ou la convaincre, il ou elle se met en danger ou devient une menace pour d'autres personnes (y compris vous), vous vous sentez obligé·e de recourir aux soins sans consentement.

 

2. Vous allez voir le ou la médecin traitant (ou psychiatre c'est encore mieux) de votre proche, vous discutez de la demande de soins sans consentement que vous prévoyez de faire. Vous lui demandez de vous indiquer un établissement de soins psychiatriques qui pourrait accueillir votre proche.

 

3. Vous prenez contact avec cet établissement, vous expliquez votre démarche et précisez que vous avez le soutien d'un·e médecin, et vous donnez son nom. Vous demandez à l'établissement par quel moyen vous devez leur adresser votre demande de soins sans consentement (email, fax, en recommandé, en main propre...).

 

4. Vous demandez au ou à la médecin traitant de votre proche d'établir le 1er certificat médical. Attention, il faut que votre proche ait été vu·e suffisamment récemment par ce·tte médecin, sinon son certificat pourrait être remis en cause... C'est vrai qu'a priori, il n'y a pas de délai légal à respecter entre le moment où le ou la médecin voit votre proche et le moment où ce·tte médecin établit le certificat médical. Et le ou la médecin n'est évidemment pas obligé·e d'être en consultation avec votre proche au moment où il ou elle établit le fameux certificat. Mais encore une fois, tout cela donnera du poids (ou non) à votre demande...

 

5. Vous faites pareil avec le ou la psychiatre traitant de votre proche, s'il y en a un·e. Sinon, il faut vous entretenir avec un·e psychiatre de l'établissement d'accueil pour obtenir ce 2e certificat médical.

  • Cela peut vous paraître compliqué pour une demande de premiers soins psychiatriques, puisque votre proche n'est connu·e d'aucun·e psychiatre ni établissement. Gardez en tête que si c'est le cas, c'est problablement qu'il y a moyen d'amener votre proche à accepter des soins, que vous n'êtes potentiellement pas dans la bonne démarche, et que votre demande de soins sans consentement a peu de chances d'aboutir. Si vous persistez, établissez une stratégie avec le ou la psychiatre du futur établissement d'accueil.
  • A priori, le ou la psychiatre de l'établissement d'accueil ne pourra pas établir de certificat simplement par rapport à ce que vous lui dites de votre proche sans l'avoir vu·e. Ça paraît logique. Mais de toute façon, le mieux est de vous entretenir directement avec ce·tte médecin, qui sera le ou la mieux placé·e pour répondre à vos questions précisément.

 

6. Une fois que vous avez obtenu les 2 certificats médicaux, vous rédigez votre demande de soins sans consentement à la main selon la 2e page de ce modèle, en l'adressant au ou à la directeur·trice de l'établissement d'accueil. Vous en gardez une copie au cas où, et vous l'envoyez par le moyen que vous aura indiqué l'établissement d'accueil.

 

7. Vous prenez soin de vous, parce que tout ça n'est pas facile. Vous en parlez à des proches en qui vous avez confiance (ou vous vous adressez à une association de soutien) pour ne pas rester seul·e à porter ce fardeau et pour que d'autres personnes puissent prendre le relais si jamais vous n'étiez plus en état de le faire.

 

8. Vous vous assurez que les droits de votre proche (et les vôtres, notamment d'être informé·e) sont respectés lors de ces soins sans consentement. Vous en trouverez un bon récap, selon votre situation, sur ces pages du Psycom. Tout cela sera facilité par le fait que l'établissement d'accueil est légalement tenu de vous informer de l'évolution des choses, et par le fait que le ou la JLD fera son boulot de JLD.

 

Pensez à consulter un·e thérapeute qui pourra vous aider à traverser ces moments difficiles... Et courage !

 

Pour aller plus loin

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